Délégation de pouvoirs et droit pénal des affaires

Comment un dirigeant ou cadre peut-il éviter de voir sa responsabilité pénale engagée ?

 

Grâce à la délégation de pouvoirs.

 

Il s’agit d’un mécanisme de droit pénal des affaires qui permet au dirigeant d’être exonéré de sa responsabilité pénale en transférant ses pouvoirs, dans un domaine limité et bien précis, à un autre membre de la société.

 

Le chef d’entreprise ne peut veiller personnellement au respect de l’ensemble de la réglementation, y compris dans des domaines très techniques, au sein de sa société. C’est ce qui commande et justifie cette notion de délégation de pouvoirs.

 

Par exemple : le dirigeant d’une entreprise de cosmétiques peut déléguer au salarié qui travaille au sein du laboratoire de la société le pouvoir de s’assurer que le contenu des produits créés est conforme aux normes environnementales et de santé applicables.

 

Afin de pouvoir être invoquée par un dirigeant pour s’exonérer de sa responsabilité pénale, la délégation de pouvoirs doit répondre à des conditions précises.

 

Le délégataire doit disposer de la compétence, de l’autorité et des moyens nécessaires à l’accomplissement de la mission qui lui est confiée :

 

-       la compétence : le délégataire doit avoir des connaissances techniques mais surtout une connaissance des normes applicables en la matière déléguée. Un défaut de formation du délégataire peut donc priver d’effet la délégation de pouvoirs.

 

-       l’autorité : le délégataire ne doit pas être contraint de se limiter à transmettre les ordres de sa hiérarchie et doit pouvoir, lui-même, disposer d’un pouvoir de commandement et d’un pouvoir disciplinaire.

 

-       les moyens : le délégataire doit disposer des moyens techniques et financiers pour mettre en œuvre la mission qui lui est déléguée.

 

A cela s’ajoute une quatrième condition, qui sera elle observée au fil du temps, lors de la mise en œuvre concrète de la délégation de pouvoirs : l’autonomie dont dispose le délégataire. Ainsi, le dirigeant qui s’immisce dans le domaine concédé au délégataire remet en cause la validité même de la délégation de pouvoirs.

 

Si ces conditions ne sont pas remplies, la délégation de pouvoirs ne produira aucun effet, et la responsabilité pénale du dirigeant continuera de pouvoir être engagée.  

 

A noter, le délégataire peut lui-même consentir une subdélégation à un autre salarié de l’entreprise.

 

En revanche, les codélégations sont prohibées. Le chef d’entreprise ne peut déléguer à plusieurs personnes les mêmes missions, ce qui serait « de nature à entraver les initiatives de chacun des prétendus délégataires ».  

 

La délégation de pouvoirs est une notion centrale notamment en matière de sécurité au travail. En cas de délit de blessures ou homicide involontaires, il est important de savoir quelle personne physique, au sein de l’entreprise, peut se voir reprocher une faute non intentionnelle (au sens de l’article 121-3 du code pénal) et peut donc être condamnée pénalement.

 

Naturellement, il est fortement recommandé de recourir à un document écrit, le plus détaillé possible, afin de mettre en œuvre ces délégations de pouvoirs.

 

Ainsi, l’ensemble des protagonistes seront sécurisés sur l’étendue de leurs missions, et donc sur le périmètre d’engagement de leur responsabilité pénale.

 

Le Cabinet CLOT AVOCATS accompagne les entreprises qui souhaitent mettre en place des délégations de pouvoirs et, plus largement, celles qui souhaitent réaliser un audit sur le risque pénal au sein de leur société.

Nicolas Clot